Vues partielles de l'exposition |
Hors les murs, au musée de l'Institut Florimont novembre 2012-mai 2013 |
Jérémie Gindre, Variété des passions |
Invité par le Mamco en juin 2012 à réaliser une exposition à l’Institut Florimont, Jérémie Gindre était alors sur le point de partir en résidence d’écriture dans le Saskatchewan au Canada. Le Mamco proposait à l’artiste d’imaginer un projet pour le musée de l’établissement scolaire, un lieu, aux allures de cabinet de curiosités, oublié dans les couloirs du bâtiment des sciences et dans lequel est exposé un étrange bric-à-brac : objets historiques, coquillages et oiseaux naturalisés, rassemblés au fil des années par les enseignants. À la fois outil pédagogique et lieu de mémoire, comme quelques indices permettent de le déceler (dons d’élèves, cadeaux-souvenirs), le musée de l’Institut devint l’un des points d’ancrage du projet Variété des passions conçu par J. Gindre. Variété des passions met en relation une nouvelle éponyme de J. Gindre et douze salles d’exposition miniaturisées prenant place dans les vitrines qui accueillent les collections de Florimont. Ce titre renvoie au caractère incongru et attachant de ces collections et évoque l’histoire d’une amitié entre deux jeunes garçons et leur découverte de la « variété des passions » dans leur environnement canadien. Dans ce récit, Paul se lie d’amitié, durant ses vacances, avec Clifford qu’il rencontre dans le camping où il séjourne avec ses parents. Habitué des campements en pleine nature, le jeune garçon découvre l’organisation d’un camping super-équipé grâce à Clifford, figure incontournable de ce lieu. Happé par ses parents, Paul visite les sites touristiques et apprend à connaître les mœurs et usages de la région de Drumheller, « capitale du dinosaure », où ils séjournent. Ainsi, il assiste à une représentation théâtrale de la Passion du Christ dans un site naturel ou découvre un musée historique régional faisant se côtoyer des objets hétéroclites rassemblés par une communauté d’habitants. À l’Institut Florimont, J. Gindre a passé les vitrines au blanc d’Espagne, laissant le musée dans un état de chantier. Dans ces masques clairs des formes irrégulières ont été grattées et donnent à voir des dioramas reconstituant des scènes à la manière des musées d’histoire naturelle. Conçues comme de véritables salles d’exposition, les vitrines portent des noms aux accents naïfs : salle Camping, salle Ciel, salle Détente, salle Malchance, salle Monticule, salle Oiseaux, salle Prairie, salleRêve, salleRoche, salleTemps, salleTortueet, salle Trouvaille. Dans chacune d’elles, J. Gindre met en scène des objets provenant du musée de Florimont, des œuvres de sa production ainsi que des œuvres de la collection du Mamco. Coquillages, roches, planétarium, animaux naturalisés, maquettes de Siah Armajani, dessins de Allan McCollum et de Didier Rittener, œuvres de Piero Gilardi, Sol LeWitt, Amy O’Neill, Jim Shaw, Alison Knowles, Gérard Collin-Thiébaut, Pierre Leguillon, Anne Marie Jugnet et Alain Clairet cotoient des pièces de J. Gindre, provoquent des coïncidences et entrent en résonnance avec le récit. Adepte de romans photos et de diaporamas de conférences, J. Gindre produit ici des arrêts sur image et invite le visiteur à glisser son regard dans une ouverture étroite rappelant le principe des images miniatures des stéréoscopes touristiques. Tel le jeune Max Fischer dans Rushmore, le film de Wes Anderson (1998), personnage fantasque et fondateur de divers clubs de son école allant de l’escrime à l’apiculture, J. Gindre joue le mélange des genres et invente une muséographie « sincèrement » décomplexée, reprenant l’identité visuelle des espaces du Mamco, la couleur de ses sols et murs. Zone de rupture entre lieu de distraction, de mystère et de pédagogie, Variét des passions a affaire au décor. Le récit et l’exposition sont déplacés dans des lieux aussi prosaïques que complexes comme le camping ou le musée d’école. Les dioramas, récurrents dans l’œuvre de J. Gindre, sont ici thématiques et font écho avec drôlerie, voire idiotie, à des scènes de la nouvelle et provoquent des associations aléatoires. Ainsi, une passion pour les chips, des histoires familiales, un engouement pour une application de téléphone destinée à orienter les rêves créent un aller-retour entre la fiction du récit et la présence des objets. L’usage de ces dispositifs proches des maquettes révèle l’intérêt de J. Gindre pour leurs capacités à compenser le réel : « Il n’y a pas besoin de construire quelque chose en taille réelle si sa projection imaginaire est possible grâce au modèle réduit. Au contraire, il y a dans la maquette quelque chose que sa réalisation en taille réelle n’atteindra jamais. » (J. Gindre) |
Jérémie Gindre est né en 1978 à Genève
où il vit. www.jeremiegindre.ch |
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