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  Nicolas Faure 

exposition temporaire
Commande publique, Strasbourg, 03.99-01.00   

Vue partielle de l'exposition

Franco Martin, Bruno Charneau, Sébastien Muths
photographie couleur ; 20 x 25 cm
coll. Communauté urbaine de Strasbourg

 





Nicolas Faure,
Commande publique, Strasbourg, 03.99-01.00

in cycle Vivement 2002 !, troisième épisode
du 26 octobre 2000 au 21 janvier 2001

Les villes sont souvent la proie des chantiers qui en changent continûment la forme. Ils désorganisent les flux, obstruent les perspectives, déchirent l'espace commun. Leur violence fait parfois spectacle – de ceux qu'on regarde pour moins les subir. Mais que regardons-nous des chantiers, qu'y voyons-nous ? Quelle considération, par exemple, accordons-nous aux acteurs des chantiers, aux ouvriers qui y travaillent sous nos yeux ? Comment les voyons-nous ? Les regardons-nous comme des sujets, des personnes, des hommes, plutôt que comme des objets, prothèses vivantes des machines mortes ? Leurs vêtements, si voyants soient-ils, ne les protègent-ils pas aussi du regard que nous pourrions porter sur eux ? Et leur uniforme ne nous protège-t-il pas du regard qui en ferait des semblables ? Ne nous accommodons-nous pas trop aisément de l'oblitération qu'il opère de leur individualité, de leur identité ? L'ère post-industrielle n'est-elle pas aussi celle de l'étrange altérité du travailleur manuel – inquiétant reliquat d'une époque révolue ? Tout regard est un regard de classe en cela déjà qu'il range ce qu'il embrasse dans la classe des objets tant qu'il ne s'offre pas au risque de l'unique regard de l'autre.

Voici, dans ces soixante photographies de Nicolas Faure, que nous sommes affrontés sans phrases à des sujets qui nous regardent et, dans le même instant, à ces travailleurs sans noms des chantiers urbains, ces figures sémiotiques du travail, dont nous n'avons peut-être jamais croisé le regard ni cherché à le rencontrer. Il n'est certes pas nouveau que la photographie se donne ce type de portrait pour thème. Les images de travailleurs scandent même son histoire de leur propre histoire qui est aussi celle de leur progressive disparition, du retrait progressif de leur visibilité humaine au profit de leur hyper-visibles devenir-machine et devenir-signe. Et la force de ces images tient précisément à l'irruption, l'effraction, de ces regards qui nous regardent sur la surface aveuglante de leurs corps plastifiés de couleurs criardes. Leurs poses – qui sont aussi des pauses –, ils les ont exactement choisies, comme les outils qu'ils tiennent à exhiber, leurs silhouettes – qui sont aussi toute leur histoire –, ils les exposent sans fard comme autant de récits personnels, c'est-à-dire de libertés conservées ou conquises. Ainsi l'acte photographique n'est-il ici que le truchement muet d'un acte identitaire dialectique et souverain.

Réalisées dans le cadre d'une commande publique (l'accompagnement artistique de la Ligne B du tramway de Strasbourg), ces photographies ont été affichées en grand format sur les panneaux publicitaires de la Communauté urbaine durant la période de mise en service du tram. Le nom de chaque travailleur y surmontait son portrait, faisant sortir de leur anonymat ces figures dont le regard avait à lui seul renversé l'aspect.


Nicolas Faure est né en 1949 à Genève où il vit.